La gloire de mon nom se confond avec son passé. Je jette mon regard par-dessus les siècles, et j'y vois la lente agonie d'un sang héroïque. Je sais que je suis une fin de race. Je ne fuis pas mon destin : je me plonge dans la décadence et révère avec mélancolie les honneurs éteints. Désormais les gueux m'entourent, se pressent contre moi, mêlent leur souffle au mien : qui peut encore dire ce qui me sépare d'eux ? A force de les côtoyer, je leur ressemble. Ma vanité s'étouffe.
Je charrie le poids des siècles passés. Ils se rappellent à moi de toutes les manières. Ils me troublent et dévient mes actes.
J'ai reçu hier soir une jeune amie italienne, Angela, Marquise de Castel Gandolfo. La finesse de sa taille, la blancheur de sa gorge, l'exquis rose de ses joues, tout cela allié à une parure de la plus grande magnificence, ont promptement fait de moi son humble serviteur. Les Italiennes ont du tempérament, loin de la rigueur et sévérité des Françaises, que j'ai maintes fois éprouvées, et portent en elles une puissance qui leur fait emplir l'espace d'un seul coup d'oeil. Lorsqu'elle parut, il n'y eut plus qu'elle, et pour la saisir, il ne pouvait y avoir que moi. Le regard méditerranéen fait en effet croire à chaque homme qu'il en est l'objet. Cette illusion ne m'a pas épargné.
Fort heureusement, elle ne fut guère farouche, et l'entreprendre fut assez aisé. Ma auguste mine n'y fut sans doute pas pour rien, tout comme mon habillement, qui ne faisait mentir aucune partie de mon corps. D'une force incomparable quelques instants au paravant, dans mes bras elle ne fut plus que douceur et lascivité. Je l'amenai dans quelque alcôve de mes appartements et commençai à la déshabiller savamment. Je vis paraître son cou, puis surgit sa nuque, ensuite se déploya un dos semblable à l'albâtre, enfin elle ne me refusa pas la vue de son séant.
Et là, les siècles m'engloutirent.
Seul le XVIIIè a su envelopper la femme d'une atmosphère vicieuse, contournant les meubles sous la forme de ses charmes, imitant les contractions de ses plaisirs, les volutes de ses spasmes, avec les ondulations, les tortillements du bois et du cuivre, épiçant la langueur sucrée de la blonde, par son décor vif et clair, atténuant le goût salé de la brune, par des tapisseries aux tons douceâtres, aqueux, presque insipides. Et surtout, seul ce siècle a déclaré l'identité entre la joue et la croupe ; il les a fait toutes deux roses, au milieu de la blanche douceur. On poudre demi-lunes et pommettes.

Face à cette découverte, qui une nouvelle fois me faisait traverser les âges, me rappelant l'immense fortune amoureuse de ma noble famille, je restai un instant interdit. Puis je décidai de prendre mon plaisir comme je l'avais entendu.
Je battis des paupières. Je clignai des yeux.
Ce plaisir délicieux, cette faveur ultime, laquelle elle est, tu l'auras sans peine deviné, ô lecteur, hypocrite lecteur...
Je charrie le poids des siècles passés. Ils se rappellent à moi de toutes les manières. Ils me troublent et dévient mes actes.
J'ai reçu hier soir une jeune amie italienne, Angela, Marquise de Castel Gandolfo. La finesse de sa taille, la blancheur de sa gorge, l'exquis rose de ses joues, tout cela allié à une parure de la plus grande magnificence, ont promptement fait de moi son humble serviteur. Les Italiennes ont du tempérament, loin de la rigueur et sévérité des Françaises, que j'ai maintes fois éprouvées, et portent en elles une puissance qui leur fait emplir l'espace d'un seul coup d'oeil. Lorsqu'elle parut, il n'y eut plus qu'elle, et pour la saisir, il ne pouvait y avoir que moi. Le regard méditerranéen fait en effet croire à chaque homme qu'il en est l'objet. Cette illusion ne m'a pas épargné.
Fort heureusement, elle ne fut guère farouche, et l'entreprendre fut assez aisé. Ma auguste mine n'y fut sans doute pas pour rien, tout comme mon habillement, qui ne faisait mentir aucune partie de mon corps. D'une force incomparable quelques instants au paravant, dans mes bras elle ne fut plus que douceur et lascivité. Je l'amenai dans quelque alcôve de mes appartements et commençai à la déshabiller savamment. Je vis paraître son cou, puis surgit sa nuque, ensuite se déploya un dos semblable à l'albâtre, enfin elle ne me refusa pas la vue de son séant.
Et là, les siècles m'engloutirent.
Seul le XVIIIè a su envelopper la femme d'une atmosphère vicieuse, contournant les meubles sous la forme de ses charmes, imitant les contractions de ses plaisirs, les volutes de ses spasmes, avec les ondulations, les tortillements du bois et du cuivre, épiçant la langueur sucrée de la blonde, par son décor vif et clair, atténuant le goût salé de la brune, par des tapisseries aux tons douceâtres, aqueux, presque insipides. Et surtout, seul ce siècle a déclaré l'identité entre la joue et la croupe ; il les a fait toutes deux roses, au milieu de la blanche douceur. On poudre demi-lunes et pommettes.

Face à cette découverte, qui une nouvelle fois me faisait traverser les âges, me rappelant l'immense fortune amoureuse de ma noble famille, je restai un instant interdit. Puis je décidai de prendre mon plaisir comme je l'avais entendu.
Je battis des paupières. Je clignai des yeux.
Ce plaisir délicieux, cette faveur ultime, laquelle elle est, tu l'auras sans peine deviné, ô lecteur, hypocrite lecteur...